Depuis le plan Durafour de refonte des grilles de traitement des fonctionnaires (accords de février 1990), les professeurs agrégés ont connu un déclassement ininterrompu et sans équivalent pour aucun autre corps de la fonction publique d’État. Tous les corps avec lesquels les agrégés avaient la parité indiciaire (IPR, colonels, administrateurs civils, commissaires divisionnaires…) ont obtenu à ce moment l’accès à l’échelle lettre B ; les agrégés ont attendu 2017 et le PPCR, qui leur a pris d’une main ce qu’il donnait de l’autre ! Les IPR et même les IEN ont déjà obtenu la HEBbis, ainsi que les colonels et les commissaires divisionnaires ; les personnels de direction des EPLE y auront quant à eux accès au 1er janvier 2025. Pour les agrégés, il n’en est pas question actuellement.
Le déclassement s’est produit non seulement par rapport aux corps équivalents des autres ministères, mais également au sein même du ministère de l’Éducation nationale, puisque tous les corps d’enseignants, à l’exception des agrégés, ont vu leur situation s’améliorer au niveau indiciaire de manière significative – et le SNALC évidemment ne peut que s’en réjouir. En 1990, un enseignant A-type terminait sa carrière à L’indice majoré (IM) 740 et un agrégé à l’IM 960 ; en 2023, c’est 977 pour le certifié, PLP, PE, P.EPS… et 977 aussi pour l’agrégé s’il n’obtient pas la classe exceptionnelle. Si l’on considère la période qui précède la création de la hors classe des certifiés jusqu’à nos jours, l’IM sommital est passé de 650 à 977, soit une augmentation de 50 % environ pour ce corps d’enseignants, alors que dans le même temps, l’indice terminal des agrégés est passé de 960 à 1072 soit une augmentation de seulement 11% !
Il existait par ailleurs une indemnité pour un professeur agrégé enseignant dans plus de 4 classes dont le montant était largement supérieur à l’ISOE part fixe , elle n’a jamais été revalorisée, puis elle a été supprimée quand l’ISOE, qui a évolué régulièrement en fonction de la valeur du point d’indice, a fini par la rattraper : pendant cette période transitoire, tous les enseignants ont donc connu une augmentation indemnitaire – certes bien modeste -, sauf les professeurs agrégés (voir décret 93-55 du 15 janvier 1993).
C’est le même processus qui est en cours avec l’indemnité des professeurs principaux agrégés (au collège et en classe de seconde), bloquée à 1609,44 € depuis des années alors que l’ISOE part modulable a été revalorisée.
Il faut souligner aussi que lorsqu’on augmente des indemnités de manière forfaitaire (d’un même montant quel que soit le corps) comme ce fut le cas de l’ISOE part fixe portée à 2550€ ou de la prime Grenelle, les agrégés sont proportionnellement moins revalorisés. De même, l’octroi de points d’IM de manière uniforme (comme les 5 points ajoutés au 1er Janvier 2024) ne leur est pas favorable, puisqu’en %, ils reçoivent moins que les autres corps.
Ainsi, petit à petit, quel que soit le pouvoir en place, et depuis près de 35 ans, la convergence se fait et la marche vers le corps unique des enseignants se poursuit – la création du corps des administrateurs de l’État, dans lequel on trouve maintenant les sous-préfets (à parité indiciaire avec les agrégés en 1989 !) et les administrateurs civils en est l’illustration dans un autre domaine.
Depuis les élections professionnelles de décembre 2022, il n’existe désormais plus qu’une seule instance paritaire pour tous les corps enseignants du second degré : la disparition des CAPA et CAPN agrégés annonce certainement la remise en cause à terme du caractère national de la gestion de ce corps et la disparition de sa singularité.
Pour finir, pour rappel, jusqu’à la session 1988, un professeur agrégé n’était pas stagiaire, mais en stage et titularisé dès la réussite au concours. Les agrégés ont perdu en 1989 cette particularité pour devenir agrégés stagiaires lors de l’année scolaire 1989-1990 dans les CPR (attaque directe sur leur statut). Mais si l’on peut admettre qu’un agrégé sortant de l’université et n’ayant jamais enseigné subisse ce sort, plus incongru est le fait qu’on nomme stagiaire, après sa réussite aux épreuves du concours interne (ou externe) de l’agrégation, un certifié expérimenté qui donne entière satisfaction dans ses classes, alors que le même aurait été agrégé titulaire s’il était passé par la liste d’aptitude. C’est tout le contraire de la version initiale du statut de 72, où les recrutés par liste d’aptitude effectuaient un stage probatoire avant titularisation dans le corps des agrégés ! Cela constitue la 1re attaque directe du concours d’agrégation, suivie de bien d’autres depuis.