En ce XXIe siècle, pourquoi donc la France s’entête-t-elle à faire appliquer le principe de laïcité, à l’heure où le tolérant Danemark rétablit le délit de blasphème ? Nous ne sommes plus au siècle des Lumières, cela est entendu. Peut-être à celui où on les éteint ?
C’est ainsi que d’un banal cours de français en 6e surgit le côté obscur de la force. L’histoire relevant quasiment de la science-fiction, les amateurs du genre seront servis. Je m’en vas vous raconter les d’Issou de l’affaire…
Un beau jour, une enseignante de Lettres eut l’idée saugrenue de montrer un tableau du Cavalier d’Arpin illustrant une scène des Métamorphoses d’Ovide : Actéon surprend Diane au bain avec ses servantes, toutes dans le plus simple appareil. Ah, ces artistes !… Quelques élèves scandalisés manquèrent tourner de l’œil à la vue de ces affriolants appâts que la décence nous interdit de nommer ici.
Courant rapporter à leurs géniteurs la vision apocalyptique que l’école laïque leur fit subir, ces derniers s’empressèrent de s’offusquer dans les règles de l’art. Un psychodrame aux accents de Tartuffe : « Par de pareils objets les âmes sont blessées ».
Dans semblabla cas, se tait-on ? Impensable que de telles images pornographiques aient été dans les programmes ! Ce professeur malsain avait montré des seins à dessein pour offenser les « bons » musulmans, impie c’est tout ! Les iconoclastes tenaient leur prétexte. Dans une ambiance voltaïque parfaitement anti-laïque, les voici partis en croisade contre l’enseignante : « Raciste ! Islamophobe ! » Shocking ? Bah ! Même le rectorat de Versailles, si l’on en juge par la promptitude de sa réaction, ne fut pas si prosaïque… Trois semaines pour intervenir, un « délai raisonnable » à l’échelle du temps administratif – sorte de condition a priori de son insensibilité.
Kant au SNALC, il tient à souligner le courage et la solidarité admirables des enseignants envers leur collègue, déclenchant le truchement du ministre pour qu’enfin l’enseignement laïque s’administre.
À ce petit jeu de diffamation, les prosélytes pédago-hystérico-religieux, n’ayant obtenu de revêtir les fesses nues des impertinentes déesses, auront du moins pris une belle culotte…
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1484 du 5 janvier 2023